vendredi 8 mai 2020

Nous ne sommes pas solidaires : réponse à Martine Bouliane


J’ai lu la lettre de Martine Bouliane, enseignante à la CSDM, intitulée Nous ne sommes pas solidaires. Un mot résume le sentiment qui m’habite : dommage.

Qu’est-ce que la solidarité ?

Se résume-t-elle à se rendre au travail afin de démontrer son engagement ? Son dévouement ? Sa bravoure ? 

Est-ce s’occuper de sa famille ou ses amis ? Permettre à notre ado de travailler dans un supermarché ou encore de garder la petite voisine ? Faire du bénévolat dans un organisme ? Donner aux banques alimentaires ? Acheter des produits québécois ?

Malheureusement, ce texte tirait dans toutes les directions. Un argumentaire au JE qui utilise le NOUS reflète le besoin d’une culpabilisée à trouver un bouc émissaire afin de soulager sa douleur. Un réflexe normal dans les circonstances.

Dommage.

Car cette lettre contient certains éléments, fort pertinents, qui méritent d’être discutés, mais quelques affirmations sont si grossières qu'elles nous font oublier l’essence même des débats possibles.

Est-ce que le syndicat nous fait mal paraître ? Oui. Est-ce qu’il doit prendre l’entière responsabilité de l’état actuel de notre système d’éducation ? Non.

En 2015dans La Presse, j’écrivais : « L’école publique est en déroute et aucun changement significatif ne sera apporté au système. Vous savez pourquoi ? Parce qu’il faut un projet qui ne soit ni politique, ni patronal, ni syndical, seulement original, intelligent et plein de gros bon sens… Ce que personne ne semble capable de faire dans ces trois milieux, intérêts obligent. Ce qu’il faut autour de la table, ce sont des gens de jugement et non d’allégeance. Des protagonistes qui veulent le meilleur système d’éducation pour nos enfants. »

Notre voix

Mme Bouliane, j’aurais aimé vous entendre élaborer sur la notion d’autonomie professionnelle. Qu’il ne s’agit pas d’un droit, mais d’un privilège. Celui de pouvoir choisir les meilleures approches de l’enseignement parmi celles qui existent. Celui de choisir ses méthodes de gestion de classe parmi celles qui fonctionnent le mieux.

En passant, je félicite et je remercie tous les enseignants qui n’ont pas attendu les directives d’un bord ou de l’autre. Ceux et celles qui ont utilisé leur autonomie professionnelle à bon escient. Qui ont pris grand soin de notre belle jeunesse.

J’aurais aimé lire votre explication sur le fait suivant : une CS (Beauce-Etchemin) et au moins deux autres organismes étaient prêt à partager leur expertise de cours en ligne depuis fort longtemps. La réponse du MEES ? Long moment de silence. Pourquoi ?

Je vous cite : « Au fil des ans, j’en suis même venue à me dire que les syndicats en éducation sont responsables de plusieurs problèmes d’apprentissage et du décrochage des élèves. »

Si la formation continue était obligatoire, j’imagine que je n’aurais pas eu à lire une telle énormité. La majorité des causes des problèmes d’apprentissages et du décrochage sont connues. Il existe une multitude de variables dans ce dossier complexe.

La plupart des solutions sont aussi connues. Mais il faut une volonté syndicale, patronale et politique afin de les mettre en œuvre.

Pour tout vous dire, je suis las de plusieurs choses en éducation. Votre lettre touche des incontournables pour le bien de notre profession et, en conséquence, pour celui des jeunes.

À vous qui payez près de 1000 $ par année à votre syndicat, je sympathise à votre cri de désespoir. Je paye des impôts depuis 25 ans et je n’entends JAMAIS le gouvernement prendre une position qui me rejoigne en éducation. (merci au collègue Papineau pour celle-là)

Et alors ?

Ce que la situation actuelle a démontré, c’est que les enseignants ont besoin d’une seconde voix. Une voix qui aura un rôle complémentaire à celle du syndicat.

À ce propos, je vous invite à lire la lettre Quelle voix de Stéphane Allaire de l'UQAC : « Doit-on en conclure que les enseignants sont condamnés à laisser les autres acteurs sociaux prendre la place qui devrait légitimement leur revenir ? Le contexte actuel n’indique-t-il pas qu’ils auraient intérêt à se regrouper pour se reconnaître d’abord, et s’assurer ensuite qu’on les considère à leur pleine valeur ? »

Bonnes questions !

À nous de prendre notre profession en main.

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