vendredi 26 juin 2020

Plein le cul de l'incohérence

Selon une enquête internationale menée par l'Université de Sherbrooke sur les impacts psychosociaux de la pandémie à COVID-19, les personnes dotées d'un sentiment de cohérence élevé sont trois fois moins susceptibles de présenter un trouble d'anxiété généralisée ou une dépression majeure.

Le sentiment de cohérence, c'est la faculté qui nous permet de comprendre un événement, y donner un sens et de trouver des solutions pour y faire face. Cette faculté est donc fondamentale en contexte d'adversité, comme c'est le cas depuis quelques mois.

Parmi tous les facteurs examinés dans cette étude, le sentiment de cohérence est de loin le facteur le plus fortement lié à la santé psychologique en temps de pandémie, devant l'isolement et les pertes financières.

En ce moment, je dois vous avouer que ma santé psychologique en prend un coup.

Suis-je dans la huitième épreuve des 12 travaux d’Astérix ? Dois-je obtenir le laissez-passer A-38 dans la maison qui rend fou ?

Ni anxieux ni dépressif

Pour tout vous dire, je suis en colère. En « tabarnak » comme dirait Plume.

L’éducation est-elle un monde parallèle à celui de notre société ?

Pendant que les divers acteurs en éducation organisent d’une manière démentielle la prochaine année scolaire, je constate le je-m’en-foutisme, probablement inconscient, d’une partie de la population.

Au secondaire, mon monde, on se donne corps et âme afin de préparer « adéquatement » la rentrée. Une logistique hallucinante. Une mobilisation des ressources humaines et financières titanesques. Une réorganisation épouvantable.

La liste des contraintes est si longue qu’il est impossible de rendre le tout dans un texte d’opinion. En surfant, je dirais : locaux, nettoyage, gestion de classe, choix d’options, promotion par matière, savoirs essentiels, socialisation, pédagogie, matériel, horaires, casiers, transport scolaire, espaces communs, bulles, etc.

Pourquoi se donner autant de mal à organiser une année extraordinaire ?

J’ignore pour vous, mais dans mon patelin, à Québec, je vois du grand n’importe quoi depuis environ une semaine.

Des exemples, je suis certain que vous pouvez, vous aussi, m’en fournir à la tonne.

De mon côté, on se lave les mains à l’entrée et à la sortie : au terrain de baseball avec mon plus jeune et au terrain de soccer avec mes deux plus vieux. Le Purell, ça efface les traces d’un virus psychologique. En prime, ça soulage la conscience. Ça protège, comme la méthode du thermomètre dans le bon vieux temps. Pas besoin de se tenir à deux mètres (ni à un d’ailleurs).

Signe que le temps ensoleillé est de retour, les vieux sont sortis chez IGA cette semaine. Ils magasinent en couple en plus. Un spécial deux pour un sur l’insouciance.

Pis la règle du deux mètres ? De quoi tu parles ?

Bref, on s’en « crisse » pas mal de la COVID depuis le déconfinement presque total au Québec.

Mais pas en éducation. Non monsieur !

Nous autres, on fait passer la santé publique avant la pédagogie et la réussite. Nous autres, contrairement au reste de la société, on fait les choses en grand.

Vous voulez d’autres exemples ?

Pendant que le gouvernement ouvre les bars, des universités se préparent à offrir une place sur quatre pour la formation en salle cet automne.

Pendant que le gouvernement ouvre les parcs aquatiques, des universités dépensent quelques centaines de milliers de dollars (par université !) pour de la surveillance d’examens en ligne.

J’arrête ici.

Je suis fatigué.

Pas stressé. Pas dépressif.

Juste en colère devant tant d’incohérences.

Félix Leclerc disait que la meilleure façon de tuer un homme, c’est de le payer à ne rien faire.

Aujourd’hui, je lui répondrais que la meilleure façon de tuer un homme, c’est de le payer à travailler pour rien.

 

 


jeudi 4 juin 2020

Quand le ministre se prend pour Marcel Béliveau : Surprise sur prise !

Quelles sont les qualités d’un bon ministre de l’Éducation selon Jean-François Roberge?

« Quelqu’un de déterminé, mais à l’écoute. La dernière chose dont on a besoin, c’est d’un ministre qui arrive avec des idées toutes faites et qui les implanteraient sans consulter. »

Cette belle définition, c’était avant le projet de loi sur les maternelles 4 ans et celui sur les frais scolaires. C’était surtout avant l’adoption sous bâillon du projet de loi 40.

Un projet de loi mammouth qui faisait d’ailleurs saliver Nicolas Prévost, le président de la Fédération québécoise des directions d'établissement d'enseignement (FQDE). 

À l’époque, le président de la FQDE me rappelait le personnage de monsieur Burns dans la série Les Simpson… Je l’imaginais très bien agiter ses doigts tout en murmurant : « Excellent, Roberge. »

À la recherche du pouvoir

Pourquoi la FQDE était si pressée d’assister à l’adoption du projet de loi 40 ? Un mot suffit à répondre à cette question : subsidiarité.

Un mot jouissif pour le gestionnaire crédule.

Et qu’est-ce que la subsidiarité ?

Il s’agit d’un principe qui vise à privilégier le niveau inférieur d'un pouvoir de décision aussi longtemps que le niveau supérieur ne peut pas agir de manière plus efficace.

Ainsi, le ministre de l’Éducation a fait croire au réseau que les décisions se prendraient dorénavant sur le terrain par celles et ceux qui connaissent les élèves par leur nom. Que le niveau inférieur était meilleur pour prendre des décisions efficaces.

Le problème avec ce principe, c’est qu’il reste théorique. En pratique, si le niveau supérieur pense qu’il peut agir d’une manière plus efficace, le ministre a le pouvoir de se transformer en dictateur. Nous assistons alors à la naissance d’une autocratie.

Qui sème le vent récolte la tempête

Cette semaine, l’annonce des camps pédagogiques fut le coup de grâce au lien de confiance déjà fragilisé entre Jean-François Roberge et son réseau. Jamais un ministre de l’Éducation n’aura réussi à générer autant de colère.

C’est un peu comme si nous étions les éternelles victimes d’un mauvais gag de la part de Marcel Béliveau lors d’une émission de Surprise sur prise !

Quand les représentants de la grande majorité des directions des écoles du Québec montrent les crocs aussi rapidement à la suite d’une annonce, il n’y a pas de quoi rire.

Pour ces acteurs indispensables sur le terrain, c’est le jour de la marmotte depuis le début de la crise : une approche top-down par le ministère, sans respect ni considération pour son personnel. Une approche cavalière.

Quelles sont les qualités d’un bon ministre de l’Éducation ?

Il est respectueux envers le personnel des écoles. Il s’occupe de fournir des balises claires. Il laisse les acteurs sur le terrain s’occuper du reste avec leur professionnalisme habituel.

Notre sinistre de l’Éducation s’est mis les pieds dans les plats à maintes reprises depuis le 13 mars dernier. De ce fait, il tente un rattrapage de ses erreurs. Politiquement, il essaie de sauver sa peau.

À chaque fois que les centres de services scolaires réagissent à son improvisation, il y a un risque de se mettre l’opinion publique à dos.

Bref, il nous fait porter l’odieux de sa désorganisation.

Au début de son mandat, monsieur Roberge nous informait qu’il était pressé de commencer, mais qu’il n’arrivait pas avec un bulldozer.

C’est vrai.

Le maître est plutôt arrivé avec son manuel. Son œuvre phare intitulée Et si on réinventait l’école. Depuis ce jour, il tente de convertir ses élèves. De gré ou de force.

Depuis un trop long moment, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne réinvente ni l’éducation ni la politique.