vendredi 27 mars 2020

Réponse aux directions des écoles primaires et secondaires

Bonjour à tous,

Le 23 mars dernier, j'ai lu la lettre ouverte des représentants de la grande majorité des directions des écoles primaires et secondaires du Québec, publiques et privées, qui implorent le ministre de l’Éducation Jean-François Roberge et le premier ministre François Legault de ne pas annuler ce qu’il reste de l’année scolaire au Québec.

Je dois dire que la lecture de ce texte m'a laissé un brin perplexe. 

J'ai donc proposé à Mathieu Bernière, Sylvain Bérubé, Luc Papineau et Marc St-Pierre de collaborer à l'écriture d'un texte en guise de réponse à cette lettre. Je dois dire que j'ai adoré l'expérience. Je remercie sincèrement mes quatre coauteurs. Des gars intelligents et humbles. Des gars que je respecte beaucoup et en qui j'ai confiance.

Voici le lien vers le HuffPost :


Bonne lecture !

jeudi 26 mars 2020

Pour la suite du monde en éducation (partie 2)


Si mon premier texte voulait mettre en lumière les décisions à prendre dans le but de débuter rapidement la préparation de la prochaine année scolaire, celui-ci abordera la nécessaire et primordiale transition qui s’en vient.

Il est difficile de croire qu’il sera possible de reprendre réellement plusieurs mois de congé forcé.

Comment « récupérer » tout ce temps sans école ?

D'emblée, je dois vous dire que j’ai une vision humaniste de l’éducation.

Toutefois, ma proposition pour 2020-2021 consiste à pratiquer une philosophie contraire à mon idéal: il faudra avoir une vision utilitariste de celle-ci.

Les choix à faire

Lorsque le ministre de l’Éducation prendra les décisions qui s’imposent, les équipes écoles pourront se mobiliser et planifier les séquences pédagogiques afin d’optimiser les apprentissages pour la prochaine année scolaire.

Dans les circonstances, il faudra répondre en équipe (matière, niveau, école) à des questions essentielles :

1. Est-ce que tout mon programme est indispensable ? Est-il possible de « couper » certains sujets pendant l’année de transition afin de dégager du temps ?

2. Est-ce que les sujets choisis et enseignés nécessitent des savoirs préalables ?

3. Si oui, ces savoirs préalables ont-ils été enseignés par mon (mes) collègue(s) ?

Si ces savoirs préalables n’ont pas été abordés en 2019-2020, je devrai donc prendre le temps nécessaire afin d’enseigner ces notions (qui ne sont pas à mon programme) à mes élèves.

Est-ce qu’il faudra ajouter des heures de cours ? Enseigner lors de certaines journées pédagogiques ? Offrir des cours de rattrapage selon un horaire spécial ?

Comment aider les élèves les plus vulnérables ? Ceux qui auront besoin d’un peu plus de temps ?

À ne pas en douter, cette prochaine année scolaire sera celle de l’adaptation et de la flexibilité.

Le pire scénario serait de croire que nous détenons individuellement les meilleures idées, de foncer la tête la première et de nous rendre compte, à l’automne, que le voisin avait une excellente solution à laquelle nous n’avions pas pensée.

C’est ici que j’invite tous les services éducatifs des différents centres de services à communiquer entre eux dès maintenant. Je crois qu’ensemble, il est possible de trouver quelques solutions exceptionnelles pour optimiser les apprentissages.

Notre Politique d’évaluation des apprentissages insiste sur le fait que « l’élève n’apprend pas pour être évalué : il est évalué pour mieux apprendre ». Ainsi, l’année 2020-2021 sera l’opportunité de donner plus d’importance à une évaluation qui soutient l’apprentissage. Une évaluation des apprentissages au service de l’élève. Une évaluation formative de qualité.

Souhaits

Notre système d’éducation enferme nos enfants et nos adolescents dans un cercle vicieux : « on déplore que les élèves travaillent pour les notes mais, du même coup, on utilise les notes comme principal (seul ?) moyen pour « les motiver ». On maintient ainsi les élèves dans un état de dépendance vis-à-vis des notes… et du professeur qui les attribue. » (Laveault, 1994)

Je vous invite à profiter de la situation actuelle pour changer cette perception de l’apprentissage chez nos jeunes. Selon moi, il s’agit d’un moment privilégié afin de cultiver le désir d’apprendre… juste pour le plaisir.

À ceux et celles qui en sont capables, vous pouvez suivre la suggestion de Normand Baillargeon et expérimenter l’école à la maison. Il ne propose pas de reprendre ce qui aurait été fait à l'école, mais de travailler à partir de situations authentiques. C'est aussi ma suggestion. Utiliser ce moment "particulier" pour faire des apprentissages signifiants.

À mes collègues enseignant.e.s qui désirent enseigner à distance, pourquoi ne pas sortir de notre cadre usuel ?

Plutôt que de faire « la matière à l’horaire », pourquoi ne pas créer un rendez-vous éducatif avec les jeunes ?

À ce propos, la page Facebook de Yannick Bergeron est un exemple à suivre. Je salue ici son excellente initiative. Il présente des expériences scientifiques à faire à la maison.

Vous irez écouter ses capsules.

Juste pour le fun d’apprendre.






mercredi 25 mars 2020

Pour la suite du monde en éducation (partie 1)


Pour les éternels optimistes, il est possible que les écoles primaires et secondaires reprennent du service au mois de mai. Pour les réalistes, il y a fort à parier que l’année scolaire 2019-2020 est maintenant terminée.

Peu importe le scénario envisagé, la 3e étape du bulletin scolaire sera soit lourdement amputée, soit complètement annulée. Comme sa valeur représente 60 % de la note finale, il faudra prendre une décision rapide en ce qui concerne les directives quant aux dossiers des élèves.

Est-ce que le Québec doit imiter l’Alberta et permettre le passage automatique à l’année suivante ?

Et si tel n’est pas le cas, j’ai deux petites questions pour vous : qui aura à reprendre son année et comment justifier cette décision ?

En toute humilité, je vous propose un résumé de mes réflexions. Ce premier texte abordera les décisions à prendre le plus rapidement possible. Le second discutera des enjeux pour la prochaine année scolaire.

À propos des cours à distance

Des cours en ligne ne changeront absolument rien aux orientations que le ministère de l’Éducation devra prendre pour nos enfants et nos adolescents.

À ce propos, le communiqué récent du syndicat des professeur.e.s de la Télé-université est révélateur : « Proposer de remplacer l’enseignement en présentiel par l’enseignement à distance en « un claquement de doigts », c’est répandre une conception fausse du travail d’enseignement en général, et de l’enseignement à distance en particulier […] C’est aussi méconnaître les spécificités de l’enseignement à distance, notamment ses aspects pédagogiques, organisationnels et juridiques. »

Pour les rêveurs parmi nous, malgré toutes nos bonnes intentions, ce sont (encore une fois et malheureusement) les élèves vulnérables qui vont en prendre pour leur rhume. Pour eux, la meilleure solution consiste à être à l’école.

À propos de l’évaluation

Les valeurs retenues par le ministère de l’Éducation (MEQ) dans sa Politique d’évaluation des apprentissages constituent l’assise d’une évaluation de qualité. Elles sont d’une importance capitale si l’on vise l’égalité des chances et la réussite pour tous.

Le choix du MEQ « s’est donc arrêté sur les valeurs fondamentales que sont la justice, l’égalité et l’équité, auxquelles s’ajoutent trois valeurs instrumentales, soit la cohérence, la rigueur et la transparence ».

Et à quoi sert l’évaluation ?

Les deux principales fonctions dans le domaine scolaire sont l’aide à l’apprentissage (aussi appelée formative) et la reconnaissance des compétences (aussi appelée sommative).

Ces différentes fonctions doivent être perçues comme complémentaires. Néanmoins, la vision ministérielle est claire : on doit se concentrer sur l’évaluation en vue de favoriser l’apprentissage. 

Plan de match

Considérant,
- Le « risque » pédagogique des cours en ligne qui sont ou seront implantés en catastrophe ;
- Les valeurs et les fonctions de l’évaluation ;
- La fragilité scolaire de tous les élèves vulnérables.

Le ministre de l’Éducation doit :
- Annuler la 3e étape (excellente décision d’avoir annulé les examens de juin du ministère) ;
- Donner une directive claire et immédiate quant à la marche à suivre dans la production des bulletins finaux. (En ce qui me concerne, j’appuie le modèle albertain)

Ces décisions nous mettront en mode « préparation de la prochaine année scolaire ». Elles permettront de prévoir l’organisation scolaire 2020-2021 - dont prioritairement la formation des groupes.

Ainsi, les enseignant.e.s choisiront leur tâche et les contrats seront distribués à tout le personnel. À compter de ce moment, les équipes écoles pourront se mobiliser et planifier les séquences pédagogiques afin d’optimiser les apprentissages de l’an prochain.

De plus, dans un souci de respect des valeurs fondamentales associées à l’évaluation, le ministre de l’Éducation doit ordonner un temps d’arrêt pour juin 2021 en ce qui concerne tous les examens du ministère et ceux des centres de services.

Cette condition est essentielle à une transition harmonieuse, mais elle doit s’accompagner d’une autre mesure exceptionnelle…

Le patronat et le syndicat doivent annoncer un statu quo en ce qui concerne la négociation de la convention collective et reconduire celle-ci jusqu’en juin 2021.

Maintenant, place à la rentrée 2020.

Cette prochaine année scolaire sera sous le signe des mesures adaptatives exceptionnelles.