Mise à jour :
Une version modifiée de ma réponse au président de la FEEP est publiée aujourd'hui le 21 avril dans le journal Le Devoir - École privée et école publique : un débat enfantin
Bonne lecture !
Réponse à M. Jean-Marc St-Jacques pour son texte publié dans Le Devoir du 11 avril 2016 et intitulé : Écoles privées - La FAE manipule les faits.
Une version modifiée de ma réponse au président de la FEEP est publiée aujourd'hui le 21 avril dans le journal Le Devoir - École privée et école publique : un débat enfantin
Bonne lecture !
Réponse à M. Jean-Marc St-Jacques pour son texte publié dans Le Devoir du 11 avril 2016 et intitulé : Écoles privées - La FAE manipule les faits.
Monsieur St-Jacques,
j’ai
lu avec intérêt votre discours en réponse au message véhiculé par la publicité
de la FAE. Quelle ironie de lire un texte aussi manipulateur que le vôtre ! La
propagande dénoncée s’apparente étrangement à celle que vous proposez. Je crois
qu’une certaine objectivité s’impose afin de mettre en perspective les
véritables enjeux de ce débat.
D’abord,
selon une étude du ministère de l’Éducation, le financement des écoles privées
au Québec représente en réalité 75 % des coûts. Vous affirmez que l’école
privée appartient à sa communauté. Je vous répondrai qu’elle appartient en
grande majorité au peuple québécois.
Ensuite,
vous dites que « … l’école privée affiche des taux de réussite très
élevés, et ce, même si elle accueille des élèves au profil
de plus en plus varié. En effet, plusieurs écoles privées ont adopté des
mesures et des programmes particuliers afin d’amener à la réussite des élèves
ayant des défis particuliers. »
Auriez-vous
l’amabilité de chiffrer ces informations et de dresser un portrait de la
situation par région ? Dans cette optique, je souhaiterais quelques
réponses aux questions suivantes :
- Quel est le pourcentage des écoles privées qui ne sélectionnent pas leurs élèves ?
- Quel est le ratio entre le nombre de demandes d’admission et le nombre d’élèves admis ?
- Quel est le nombre d’établissements offrant des programmes particuliers pour les élèves ayant des défis particuliers ? (en passant, qu’est-ce qu’un défi particulier ?)
- Quel est le nombre de professionnels affectés à ces mesures et à ces programmes ?
Pour votre
information, « on estime qu’environ 20 % des élèves qui fréquentent le réseau public sont handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage, alors que la proportion serait inférieure à 3 % dans les écoles privées. » (Le Devoir, 2015)
Vous
savez quoi M. St-Jacques ? J’en ai marre de constater le gaspillage des ressources
humaines et financières dans le but d’alimenter ce débat enfantin opposant
l’école privée à l’école publique. J’en ai marre de voir un syndicat utiliser
les cotisations de ses membres à des fins publicitaires. J’en ai marre que
cette concurrence publique-privée entraîne une dilapidation éhontée des fonds
publics.
J’ai
déjà mal au cœur lorsque je pense à l’automne prochain. Lors de cette période
de grande frénésie mercantile en éducation, nous serons encore témoins des manœuvres des écoles publiques et des écoles
privées afin d’attirer les clients potentiels : portes ouvertes, pubs
télé, pubs radio, pubs dans les journaux, etc. Le payeur de taxes est endoctriné et
il ne se pose pas de questions. La concurrence est synonyme de qualité. Bref,
il est tristement acceptable de dépenser pour la vente de son produit.
Il
y a des coupes en éducation et il faut les dénoncer ? Fort bien. Attaquer l’école
privée est-elle la meilleure façon de le faire ? Je ne crois pas. Ce qu’il
faut, c’est le désir commun de construire le meilleur système d’éducation non
pas pour le bien de son enfant, mais celui de tous les enfants.
Selon le rapport d’un comité d’experts (2014), « les élèves qui sont plus à
risque d’échouer pour des raisons liées à leur statut socioéconomique ou à leur
origine ethnique, bénéficient significativement de la présence d’élèves forts
dans leur classe, alors que les élèves forts ne sont pas pénalisés par la
composition hétérogène de leur classe.
Favoriser l’hétérogénéité des classes et des établissements scolaires apparaît donc comme un moyen peu coûteux d’améliorer l’efficience d’un système scolaire, alors que la pratique du placement sélectif des élèves dans des classes ou des écoles différentes sur la base de leurs résultats scolaires, résultats qui sont intimement liés à leur origine sociale, entraîne des coûts supplémentaires dus à la concentration d’élèves à risque dans les mêmes groupes.
Selon plusieurs recherches rigoureuses menées à travers le monde, le placement sélectif des élèves sur la base de leurs résultats scolaires et de la capacité de leurs parents de choisir une école ou une classe plutôt qu’une autre est à la fois inéquitable et inefficace, car il entraîne systématiquement une diminution substantielle dans les taux de réussite scolaire de l’ensemble des élèves et contribue à maintenir les inégalités sociales.
Il faut également souligner que dans un système fortement normé comme le Québec, l’effet positif de la compétition entre les écoles sur la performance de l’ensemble des élèves n’est pas démontré. »
La question fondamentale demeure la
suivante : comment permettre la mission collective de notre système d'éducation
? À ce propos, il semble que l'existence d'un système à deux vitesses et la
marchandisation de l'éducation causent beaucoup trop de tort à nos élèves
vulnérables.
En terminant, monsieur St-Jacques,
j’aimerais simplement vous rappeler que nous ne sommes pas dans l'obligation, au nom de la
justice sociale, de financer les écoles privées. Nos voisins ontariens l’ont
compris, tout comme les Finlandais … Et il s’agit, dans les deux cas, de
systèmes d’éducation extrêmement performants.