Lors
de la dernière campagne électorale, sous le thème de l’éducation, François
Legault a fait de la maternelle 4 ans son principal cheval de bataille. Les
autres grandes promesses de son parti étaient la baisse des taxes scolaires, la
valorisation de la profession enseignante et l’abolition des commissions
scolaires.
Ainsi, la CAQ n’a jamais fait de
mystère quant à son intention de transformer les commissions scolaires (CS) en
centres de services (CS !). Pour le quidam moyen, l’opération se voulait simple
et pleine de bons sens : éliminer les élections scolaires et les
commissaires.
C’est donc sous cet angle que le
projet a été présenté à la population. Un coup de génie afin que le projecteur
reste braqué sur une cible facile.
François Legault a récemment invité
l’opposition à « aller dans les centres commerciaux pour demander aux gens
s’ils souhaitent conserver les élections scolaires ou non ». À l’évidence, les gens n’ont rien à
foutre des commissaires et des élections scolaires. Si j’allais faire un vox pop
dans un centre commercial, je suis persuadé que j’entendrais ce que le premier
ministre veut entendre.
Par contre, si je posais une
deuxième question du genre « est-ce que vous pouvez me nommer un seul autre
élément du PL40 ? », il y a fort à parier que le peuple serait muet comme une
carpe.
Bref, la disparition des élections
scolaires n’est que la pointe visible de l’iceberg.
Objectif
marchandisation
Il est difficile de
comprendre pourquoi le ministre Roberge a accepté de travailler 9 mois sur son
projet de loi 5 (maternelle 4 ans ; 8 pages, 20 articles), mais qu’il s'impatiente
après à peine 4 mois de travail sur son projet de loi 40 (92 pages, 312 articles).
Comme le dit si bien Wilfried Cordeau,
« le problème avec le PL40 ne réside pas que dans le fait d'abolir une
structure élective. C'est surtout que, ce faisant, il fait sauter un verrou
stratégique pour la poursuite et l'accélération de la marchandisation de l'éducation.
La précipitation et la faiblesse des arguments qui gouvernent ce
projet depuis ses origines continuent de me convaincre qu'il ne représente pour
la CAQ et ses partisans non pas une fin en lui-même, mais un simple moyen pour
accomplir un dessein plus radical. L'enjeu réel du PL40 n'a rien à voir avec la
pertinence des élections scolaires. Il a à voir avec la marchandisation de l'éducation. »
À ce propos, une photo publiée par le
ministre de l’Éducation sur sa page FB, loi 40 à la main, est particulièrement
révélatrice de l’idéologie derrière ce projet de loi. En effet, un Youri Chassin
tout sourire, se tient bien fièrement à la droite (quel hasard) de
Jean-François Roberge.
Pour Youri Chassin, « les réformes
nécessaires doivent passent (sic) par une révision complète du rôle de l'État, par
une ouverture accrue envers les solutions de marché, la liberté de choix et
la responsabilisation individuelle. »
Selon lui, « nos
élus doivent recentrer l'État sur ses missions
fondamentales […] Cela signifie, oui, éliminer des
programmes complets. Également, ouvrir une partie du secteur de la santé et de
l'éducation, par exemple, à la concurrence et aux entrepreneurs privés. »
Avoir la
foi
Quelles sont les qualités d’un bon ministre de
l’Éducation ?
Jean-François Roberge est catégorique :
« Quelqu’un de déterminé, mais à l’écoute. La dernière chose dont on a
besoin, c’est d’un ministre qui arrive avec des idées toutes faites et qui les
implanteraient sans consulter. »
D’ailleurs, au début de son mandat, il nous informait
qu’il était pressé de commencer, mais qu’il n’arrivait pas avec un bulldozer.
C’est vrai.
Monsieur Roberge est plutôt arrivé avec sa
bible. Son œuvre phare intitulée Et si on
réinventait l’école. Et lorsqu’on semble souffrir d’un complexe de Dieu, il
devient tentant de vouloir convertir les païens. De gré ou de force.
À l’aide de son apôtre St-Youri-Chassin,
quel est ce paradis que nous propose nos élus ? Un réseau d’écoles complètement
autonomes, en concurrence totale les unes envers les autres.
Le gouvernement Legault donnera un
an aux entreprises pour présenter un plan efficace dans l’optique d’élargir le
système de consigne à toutes les bouteilles et canettes. Les nouvelles mesures
devraient entrer en vigueur au cours de l’automne 2022. Des projets
pilotes pourraient voir le jour dès cette année dans quelques villes.
Pendant ce temps, en éducation,
inutile de réfléchir, discuter, s’entendre ou même tester le projet de loi
mammouth du ministre.
Décidément, Monsieur Roberge est capable de faire des
miracles. Pendant ses Noces de Cana du 7 février dernier, au bénéfice de ses
fidèles, il a changé l’eau en vin.
Alléluia !
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