D'emblée, je dois dire que j'aime bien lire les
publications de l'Institut économique de Montréal (IEDM). Non pas que je
partage l'idéologie des principaux acteurs, mais parce que les opinions
diverses permettent de prendre le temps de réfléchir.
Par contre, je dois avouer que l’article douteux
L’école privée profite à TOUS les élèves québécois m'indispose. Pourquoi ?
Parce que son auteur signe ce texte à titre personnel. Et alors, me direz-vous
? En tant que citoyen, monsieur Kelly-Gagnon a tout de même bien le droit de
choisir l'argumentation qui fait son affaire. À sélectionner des extraits
appuyant ses convictions. Vous avez raison. Quel est donc le problème ?
C’est que l’en-tête de l’article affiche le gros
titre bien visible Blogue de l'Institut économique de Montréal. À partir du moment où un
journal vous offre une tribune, vous avez le devoir moral de faire preuve d’un
minimum de rigueur. Question d'ajouter un peu de crédibilité à ses
propos et de convaincre son lectorat, le président et directeur général de
l’IEDM utilise à fort mauvais escient l’espace médiatique que le Journal de
Montréal veut bien accorder à son institut. Les lecteurs carburent aux grands titres. Utiliser
la marque de commerce de l’IEDM afin de diffuser votre propagande personnelle
relève d’une malhonnêteté intellectuelle crasse.
Je crois qu’une minorité de lecteurs pousseront davantage la réflexion et
la recherche quant au texte de M. Kelly-Gagnon. De ce fait, ce genre de
publication fait un ravage considérable auprès de l’opinion publique.
Imaginez un instant que je suis le président et directeur général de
l’Institut scientifique national d'éducation publique. En utilisant la même
technique que M. Kelly-Gagnon, je pourrais donc répliquer de la sorte à son
article :
L’école privée NE profite
PAS à tous les élèves québécois
D’abord, soulignons que l'une de vos références, Francis Vailles (La Presse, 2015), soulève quelques nuances importantes quant aux conclusions du professeur
Lefebvre :
Cela dit, l'étude ne mesure pas à proprement parler l'effet sur les résultats de la sélection des élèves dans certaines écoles. De plus, la forte croissance du privé au secondaire ces dernières années au Québec devrait avoir un impact sur les résultats moyens des élèves, ce que l'étude ne capte pas.
Cela dit, l'étude ne mesure pas à proprement parler l'effet sur les résultats de la sélection des élèves dans certaines écoles. De plus, la forte croissance du privé au secondaire ces dernières années au Québec devrait avoir un impact sur les résultats moyens des élèves, ce que l'étude ne capte pas.
Enfin, on ne sait pas jusqu'à
quel point la composition de plus en plus difficile des classes du public tire
les résultats vers le bas et contrebalance négativement les effets du privé.
À cet égard, un comité d'experts
concluait, en juin 2014, que la ségrégation des élèves en fonction de leurs
aptitudes ou de leurs origines socioéconomiques est nuisible.
« De nombreux chercheurs
arrivent à la conclusion qu'une plus grande mixité des élèves au regard de leur
genre ainsi que de leur origine sociale et ethnique influence positivement la
réussite de tous les élèves. Ainsi, les élèves qui sont plus à risque d'échouer
pour des raisons liées à leur statut socioéconomique ou à leur origine ethnique
bénéficient significativement de la présence d'élèves forts dans leur classe,
alors que les élèves forts ne sont pas pénalisés par la composition hétérogène
de leur classe. »
Ensuite, selon Marc St-Pierre (chargé d'enseignement en administration scolaire, Université du Québec en Outaouais et consultant en éducation):
Le Québec, qui s’est si bien démarqué aux derniers tests PISA, malgré son 1er rang canadien en mathématiques chez les jeunes de 15 ans, est, avec l’Alberta, la province canadienne où les écarts de réussite sont les plus grands en fonction du statut socioéconomique, là aussi où il y a la plus faible proportion d’élèves jugés « résilients », c’est-à-dire ces jeunes qui font mentir les probabilités en réussissant contre toute attente.
Le Québec, qui s’est si bien démarqué aux derniers tests PISA, malgré son 1er rang canadien en mathématiques chez les jeunes de 15 ans, est, avec l’Alberta, la province canadienne où les écarts de réussite sont les plus grands en fonction du statut socioéconomique, là aussi où il y a la plus faible proportion d’élèves jugés « résilients », c’est-à-dire ces jeunes qui font mentir les probabilités en réussissant contre toute attente.
Le Québec partage donc avec l’Alberta
conservatrice la palme du système d’éducation le moins équitable au Canada.
Alors que nous sommes premiers de classe en mathématiques au pays, nous sommes
en fait les derniers au Canada pour ce qui concerne nos élèves les plus
vulnérables. Alors que nos élèves les plus forts réussissent en général mieux
que les autres élèves « forts du Canada », nos élèves
« faibles » sont plus faibles que leurs collègues canadiens…On est
loin du rêve d’équité et de la promesse d’offrir à chacun la meilleure
éducation possible. On est plutôt dans une espèce de logique qui voudrait que
chaque enfant ait droit à une éducation meilleure…que celle des autres !
Enfin, Mauricio Segura (L'actualité, 2014) affirme à propos de la Finlande qui attire chaque année une
cinquantaine de délégations étrangères :
Elles s’y rendent parce que, depuis 2000, ce pays de 5,3 millions d’habitants est le premier de classe en Occident dans l’enseignement au primaire et au secondaire, selon le Programme international de l’OCDE pour le suivi des acquis des élèves de 15 ans en mathématiques, sciences et lecture (connu sous le nom de PISA).
Elles s’y rendent parce que, depuis 2000, ce pays de 5,3 millions d’habitants est le premier de classe en Occident dans l’enseignement au primaire et au secondaire, selon le Programme international de l’OCDE pour le suivi des acquis des élèves de 15 ans en mathématiques, sciences et lecture (connu sous le nom de PISA).
Or, la Finlande a aboli les écoles privées dans les années 1970. « Si
vous permettez l’existence de l’école privée, vous ne pouvez garantir l’égalité
des chances, principe qui tient à cœur aux Finlandais et qui sous-tend tout
notre système d’éducation », estime Pasi Sahlberg (cadre au ministère de
l’Éducation et de la Culture, ambassadeur international du système d’éducation
finlandais et auteur de l’essai Finnish
Lessons : What Can the World Learn From Educational Change in Finland ?)
Intéressant,
n’est-ce pas ?
À titre de président et directeur
général de l’Institut scientifique
national d'éducation publique, je pourrais aussi écrire de beaux textes
d’opinion … Il suffirait seulement qu’un journal m’offre un espace publicitaire
propice à la diffusion de ma propagande.
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