mercredi 30 mars 2016

Exil des profs en Ontario (JDQ) : réponse à Joe Bleau, à Ti-Joe Connaissant et aux autres ...

L'article intitulé 2900 profs formés au Québec exilés en Ontario du Journal de Québec a fait couler beaucoup d'encre la semaine dernière. Cette nouvelle plutôt banale a provoqué une avalanche d'avis insignifiants. Les opinions diversifiées des "experts" de l'éducation ont démontré encore une fois les connaissances limitées de plusieurs individus.


Le plus dommage dans toute cette histoire, c'est que certains opportunistes profitent de l’occasion dans le but de faire avancer leur point de vue à l’aide d’hypothèses douteuses. Pour reprendre une expression québécoise de circonstance : on tire la couverte de son bord. Est-il possible de lire ou d'entendre des commentaires objectifs ? Sommes-nous en droit d’exiger un peu de rigueur ?


D'abord, soulignons que les chiffres mentionnés dans l'article méritent un brin d’analyse. Les statistiques s'étirent sur une période de 17 ans. Lors de ces 17 dernières années, 1489 profs ont quitté le Québec pour la province voisine. En gros, il s'agit d'une moyenne d'environ 88 profs/année. Est-ce si extraordinaire ? À partir de ces chiffres, certaines questions se posent dans le but de relativiser ce phénomène :
  1. Quel est le nombre total de finissants en enseignement au Québec depuis 1998 ?
  2. Quel est le nombre d'enseignants en exil au primaire par rapport à ceux du secondaire ?
  3. À la lumière de ces nouvelles données, quel est donc le % réel des départs au primaire et au secondaire ?
  4. Quel est le % d'exil des différents diplômés de notre société ?
Ensuite, il est souhaitable de relire cet article et de le mettre en parallèle avec un document fort intéressant : observations et prévisions des effectifs scolaires au Québec. Par une coïncidence miraculeuse, les départs vers la province voisine suivent le déclin de la clientèle des années 2000. Vous savez quoi ? Le nombre d'enseignants est proportionnel au nombre d'élèves.


Autre fait intéressant, le taux de natalité a fortement augmenté en 2006 lors de l’avènement du RQAP. D’ailleurs, ce boom de la natalité se répercute sur les courbes d’effectifs au primaire. Ainsi, il y a fort à parier que les enseignants qui quittent depuis le début des années 2010 proviennent majoritairement du secondaire. Vous savez quoi ? Vous avez moins de chance de travailler à temps plein s'il y a moins d'élèves.


Votre baccalauréat est terminé ? Vous cherchez du travail ? Bien que les francophones soient minoritaires en Ontario, il existe dans la province 422 écoles de langue française. Bref, la faim justifie les moyens. La grande majorité de ces enseignants quittent le Québec pour une simple et bonne raison : travailler.


Par le plus grand des hasards, je serai en visite à l’école Gisèle-Lalonde à Ottawa la semaine prochaine. Il s’agira de ma seconde visite d’un établissement ontarien en moins d’un an. Il est toujours intéressant de sortir de chez soi dans l’optique de découvrir ce qui se passe ailleurs.


J’imagine que je pourrai sûrement avoir de belles discussions avec des collègues québécois en exil. Nous pourrons alors philosopher sur quelques statistiques qui devraient nous pousser à revoir une partie de notre système d’éducation :
  • 100 % des écoles privées ne sont pas financées en Ontario ;
  • 95 % des élèves fréquentent les écoles publiques ;
  • l’écart entre les taux de diplomation des deux provinces est d'environ 10 %.
Enfin, il y a une statistique qu’on entend régulièrement au Québec : au moins 20 % des enseignants quittent la profession dans les cinq premières années. Il est toujours triste de constater le drame individuel, économique et social d’un diplômé qui, à la suite d’un baccalauréat de quatre ans, réoriente sa carrière. Au fait, j’ai une colle pour vous … 20 % d’abandon, ça représente combien d’exilés permanents ?


 

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